Modèles planétaires au fil du temps

Modèle d’Anaximandre On peut interpréter ce modèle de deux façons : · les quantités représentent un rayon (à gauche) ; ou · elles représentent une circonférence (à droite). Anaximandre ne dit rien à propos de sphères pour les étoiles ou les planètes, mais certains ont supposé une sphère de 10 fois la taille de la Terre pour elles, ce qui n’expliquerait toutefois pas le mouvement des planètes relativement aux étoiles fixes… Ici, seules les sphère du Soleil (externe) et de la Lune sont illustrées. Échelle de temps : environ 24 heures de temps réel par minute d’animation ANIMER ARRÊTER 🌞 🌕 🌍 Modèle d’Eudoxe Apparemment en réponse à Platon qui demandait comment expliquer les mouvements planétaires, et spécialement leur rétrogradation, Eudoxe imagina un système de sphères cristallines concentriques, dont certaines étaient inclinées. Si celle de l’intérieur tourne à la même vitesse que celle de l’extérieur, mais en sens opposé, alors un mouvement de boucle se produit. On ignore si Eudoxe a spécifié des paramètres exacts pour son modèle (angles et vitesses), mais on sait aujourd’hui que ce modèle ne peut pas expliquer exactement les boucles rétrogrades de Vénus ou de Mars. Bien qu’au moins quatre sphères par planète soient nécessaires, seules les deux sphères intérieures sont ici animées. La sphère bleue (ici fixe) tourne en une année, et une autre sphère externe au tout (non illustrée) tourne en 24 heures, causant le mouvement diurne des astres. Callippe, un élève d’Eudoxe, ajoutera par la suite sept autres sphères pour expliquer plus précisément certains mouvements, pour un total de 34 sphères. Terre ANIMER ARRÊTER Modèle de Kidinnu Le modèle babylonien était purement mathématique : on n’avait aucun concept d’« orbite ». Cinq ou six points d’intérêt (à droite) étaient surveillés et notés ; au fil des siècles, un modèle de prédiction s’est construit. Les premiers textes mathématiques apparaissent vers l’an −450. En tout, 440 tablettes et fragments nous sont parvenus. Dans le Système A, l’écliptique est divisé en zones, la planète ayant une vitesse angulaire précise au sein de chacune. Dans le Système B, la vitesse augmente et diminue graduellement d’un extrême à l’autre. Une partie de la tablette ACT 620 est traduite ici (Jupiter, oppositions, Système B, années −184 à −166 ; la tablette continue jusqu’en −115). a et kin-a désignent des années « bissextiles ». T₀ ΔT T ΔB B 2,07 49;42 V 27;36 37;37 24;31 ♓︎ 2,08 47;54 VII 15;30 35;49 0;20 ♉︎ 129a 46;06 IX 01;36 34;01 4;21 ♊︎ 2,10 44;18 IX 15;54 32;13 6;34 ♋︎ 2,11 42;30 X 28;24 30;25 6;59 ♌︎ 132kin-a 40;42 XI 09;06 28;37 5;36 ♍︎ 2,13 41;47,30 XII 20;53,30 29;42 5;18 ♎︎ 2,15 43;35,30 I 04;29 31;30 6;48 ♏︎ 2,16 45;23,30 II 19;52,30 33;18 10;06 ♐︎ 137a 47;11,30 IV 07;04 35;06 15;12 ♑︎ 2,18 48;59,30 IV 26;03,30 36;54 22;06 ♒︎ 2,19 49;27 VI 15;30,30 37;22 29;28 ♓︎ 140a 47;39 VIII 03;09,30 35;34 5;02 ♉︎ 2,21 45;51 VIII 19;00,30 33;46 8;48 ♊︎ 142a 44;03 X 03;03,30 31;58 10;46 ♋︎ 2,23 42;15 X 15;18,30 30;10 10;56 ♌︎ 2,24 40;27 XI 25;45,30 28;22 9;18 ♍︎ Points d’intérêt Pour Mercure et Vénus · Première visibilité le soir · Première station le soir · Dernière visibilité le soir · Première visibilité le matin · Première station le matin · Dernière visibilité le matin Pour Mars, Jupiter, et Saturne · Première visibilité · Première station · Lever acronyque · Deuxième station · Dernière visibilité Modèle d’Apollonios Ce n’est pas tant un modèle du mouvement planétaire qu’une démonstration de l’équivalence de deux principes que nous laisse Apollonios : les phénomènes observés seraient les mêmes, que les planètes tournent un cercle excentrique (à gauche) ou sur un épicycle qui tourne lui-même sur un déférent (à droite). Dans le cas illustré ici, la planète n’a aucun mouvement rétrograde, mais Apollonios avait fort probablement pensé à un système quelconque pour que cela se produise. Les écrits d’Apollonios sont aujourd’hui perdus, mais il est cité par des auteurs ultérieurs, notamment dans la Composition mathématique (ou Almageste) de Ptolémée. ANIMER ARRÊTER Modèle de Ptolémée Étayant son raisonnement de nombreuses démonstrations mathématiques et géométriques, Ptolémée en vient à conclure que les planètes se promènent sur un épicycle qui tourne lui-même sur un déférent décentré par rapport à la Terre, et qu’en plus, le mouvement de l’épicycle (É) est uniforme vu d’un troisième point, plus tard appelé équant (Q), situé deux fois plus loin de la Terre (T) que le centre du déférent (D). L’apogée (A) tourne aussi, au rythme de 1° par siècle. Le modèle de Mars (M) est illustré ici. Malgré ses critiques, ce système fonctionne assez bien pour être enseigné pendant les quelque quatorze siècles suivants. A D Q T É M λ κ̄ ᾱ Date ANIMER ARRÊTER La longitude réelle λ ne peut être calculée à partir de κ̄ et ᾱ que par trigonométrie (avec la corde, un ancêtre de notre sinus). Ptolémée fournit des tableaux permettant de la calculer avec de simples additions, soustractions, et multiplications des valeurs trouvées. À noter que tous les angles sont mesurés dans le sens antihoraire, et que la droite ÉM est toujours parallèle à la droite Terre–Soleil (non illustrée). Modèle de Naṣīr al-Dīn al-Ṭūsī Le principal reproche adressé au modèle de Ptolémée est que le déférent ne peut pas être une sphère ou un disque, puisque le centre du mouvement uniforme ne concorde pas avec son centre. Mais tenir compte de la distance variable des planètes ainsi que de la taille variable des boucles rétrogrades est difficile. Naṣīr al-Dīn al-Ṭūsī propose une solution : il conçoit un système de deux sphères permettant une variation linéaire de la distance en fonction du centrum moyen κ̄. Ce couple de Ṭūsī est en bordure du déférent (maintenant centré sur l’équant Q) et porte l’épicycle. Les paramètres sont autrement les mêmes que dans le modèle de Ptolémée. ᾱ κ̄ λ Date ANIMER ARRÊTER Modèle de Quṭb al-Dīn al-Širāzi Trouvant trop complexe le modèle de Naṣīr al-Dīn al-Ṭūsī, Quṭb al-Dīn al-Širāzi recycle le lemme d’al-Ūrdi (non illustré), qui dit que si deux droites AB et CD forment des angles égaux avec la droite BC, alors AD est parallèle à BC. Cela lui permet d’éliminer un des épicycles secondaires d’al-Ṭūsī et de ramener le centre du mouvement uniforme et le centre du déférent en un même point, qu’il situe à mi-chemin entre les deux. Son seul épicycle secondaire (la « directrice ») a un diamètre égal à l’excentricité du modèle de Ptolémée. Ce modèle n’est aujourd’hui connu que dans ses grandes lignes. Faute de connaître tous les paramètres de ce modèle, la simulation utilise certains paramètres du modèle du Mumtaḥan Zīj de Yaḥyā ibn Abī Manṣūr. De plus, les angles κ̄ (centrum moyen), ᾱ (anomalie épicyclique moyenne), et λ (longitude vraie) ne sont pas indiqués, par souci de clarté. Date 632-06-16 ANIMER ARRÊTER Modèle d’Ibn al-Shaṭīr Dans un livre intitulé L’achèvement de l’enquête et la correction des fondements, Ibn al-Shaṭīr semble avoir voulu composer une nouvelle astronomie mathématique, basée sur les observations et utilisant des mathématiques inconnues de Ptolémée. Il abat ainsi complètement l’excentrique, le déférent, et l’équant : tout est maintenant centré sur la Terre, mais avec un épicycle additionnel, qu’il nomme rotateur. Ses autres paramètres sont essentiellement ceux de Ptolémée. Par souci de clarté, le point central de chaque orbe ainsi que les angles ne sont pas indiqués dans cette animation du mouvement de Mars. Date 1331-12-24 ANIMER ARRÊTER Modèle de Nicolas Copernic Plusieurs parlent de « révolution copernicienne », mais le modèle héliocentrique avait été proposé avant Copernic. De plus, les scientifiques furent lents et difficiles à convaincre ; le terme « révolution » est donc un peu fort. Le modèle de Copernic était essentiellement le même que celui de Ptolémée, mais en changeant de référentiel. Il n’était pas plus précis, mais les instruments d’observation ne permettaient pas encore de noter la différence. Une de ses erreurs a été de prendre comme centre le soleil moyen S̄ plutôt que le Soleil vrai. Aussi, bien que ce modèle soit héliocentrique, les mouvements y sont mesurés depuis la Terre, comme dans les modèles géocentriques antérieurs. Centré sur le soleil moyen Centré sur la Terre ANIMER ARRÊTER Modèle de Tycho Brahe Observateur hors-pair, cet astronome danois fut le premier à noter les sources d’erreur : instrumentale et personnelle. Il a su prouver que les comètes sont extérieures à l’atmosphère terrestre et que le ciel n’est pas immuable comme le disaient les Anciens. D’un autre côté, il ne pouvait accepter, pour des raisons philosophiques, que la Terre ne soit pas au centre, comme dans le modèle de Copernic, et il conçut donc le modèle illustré ici, avec le Soleil et la Lune tournant autour de la Terre centrale, et les planètes tournant autour du Soleil. Il est décédé avant d’avoir pu publier les paramètres spécifiques de son modèle ; ainsi, l’animation est basée sur d’autres paramètres. Sphère des étoiles fixes Sphère des étoiles fixes Légende Soleil Lune Terre (fixe) Mercure Vénus Mars Jupiter Saturne ANIMER ARRÊTER Modèle de Johannes Kepler Excellent mathématicien, Kepler est invité par Tycho à le rejoindre, dans l’espoir qu’il puisse déterminer les paramètres du mouvement de Mars — mais Tycho ne lui donne pas accès à toutes ses observations, et Kepler piétine dans ses calculs. Après le décès de Tycho, et des déboires avec la succession, Kepler met la main sur les carnets complets, et il parvient bientôt à un modèle qui rend bien compte des observations. La principale différence est que Kepler donne une forme elliptique plutôt que circulaire aux orbites planétaires. Kepler déduit aussi trois lois du mouvement planétaire (à droite), qui seront expliquées par Newton une cinquantaine d’années plus tard. Chaque pointe a la même surface, couverte dans le même temps Note : En réalité, les orbites planétaires sont presque des cercles ; celles des comètes sont par contre souvent plus « étirées » qu’ici. Lois de Kepler Kepler déduit trois lois du mouvement planétaire : 1. L’orbite d’une planète est une ellipse dont le Soleil occupe un des foyers. ANIMER ARRÊTER 2. Le rayon vecteur balaie des aires égales en des temps égaux. ANIMER ARRÊTER 3. Le carré du temps de révolution est proportionnel au cube de la distance moyenne au corps principal. ANIMER ARRÊTER Modèle d’Albert Einstein Einstein ne figure pas sur notre affiche, et il ne s’est pas directement attaqué au mouvement planétaire, mais sa théorie de la relativité générale explique un excès observé dans la précession du périhélie* de Mercure. La théorie de la relativité générale expose la déformation de l’espace-temps par une masse : il se forme un « creux » autour de celle-ci, et l’espace-temps se « tortille » aussi dans son voisinage. Ce n’est donc pas Mercure qui bouge, mais l’espace-temps proche du Soleil par rapport à la Terre, où l’espace est moins « tortillé ». Plusieurs scientifiques étaient sceptiques par rapport à cet effet, mais il a été confirmé notamment suite à la mise en orbite des satellites du service GPS. Grandement exagéré ici, l’effet relativiste diminue selon la distance au Soleil. Les disques colorés représentent la position réelle du périhélie de chaque planète ; les gris, l’emplacement qu’il aurait en l’absence d’effet relativiste. L’effet réel est d’environ ″ par siècle pour Mercure (à titre de comparaison, l’effet non relativiste est de 575″ par siècle), ″ par siècle pour Vénus, ″ par siècle pour la Terre, 1,3″ par siècle pour Mars, et < 0,1″ par siècle pour les autres planètes. *Le périhélie d’un astre est le point de son orbite qui est le plus près du Soleil. ANIMER ARRÊTER Mercure Vénus Terre Mars Périhélie de…

Les Mésopotamiens les appelaient « moutons sauvages » ; les Grecs, les « astres errants ». Les planètes ont toujours fasciné les humains, même en ces temps reculés.

Si nous disposons aujourd’hui d’un modèle si précis du mouvement planétaire, c’est notamment grâce aux contributions des onze astronomes mentionnés ci-⁠dessus. Ils se démarquent d’une foule d’autres, illustres ou inconnus, en ceci qu’ils ont présenté des modèles nouveaux, se rapprochant toujours davantage de la réalité.

Des cercles concentriques des Grecs et des colonnes de nombres des Babyloniens, jusqu’aux ellipses de Kepler, cette page propose de vous faire découvrir quelques-uns des « géants » sur les épaules desquels Isaac Newton a dit avoir grimpé pour voir aussi loin.

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